Danuta Pawlak maintien pour les Iminiens des liens exceptionnels, elle va chez les uns et les autres entretenir la flamme ou les flammes, qu'il s'agisse de celle de la lampe d'Almichkat ou celle des amitiés anciennes. Elle a fait un tour par la Bretagne et son hôte nous en rend compte. Jean-Yves Tramoy qui va se sentir plus libre le 30 juin et qui l'a reçue chez lui, nous en parle.

« En avril ne te découvre pas d'un fil ».

Qui ne connaît pas ce proverbe ? Qui ne l'a pas entendu une fois dans sa vie ?

A l’arrivée des beaux jours il faut se garder d'un optimisme exagéré et risquer d’être malade en se découvrant trop. C'est ce qui m'est arrivé ces temps-ci, et qui m'a valu un rhume que je qualifie d'énorme ! De fait cela m'a collé au lit pendant dix jours et retardé la narration de la visite de Danka chez moi.

Maintenant le très beau temps couvre l'ensemble de la Bretagne, du nord au sud, de l'ouest à l'est, laissant augurer un dimanche chaud propice aux promenades en bord de mer. Un ciel d'azur, sans nuage aucun, est assez rare pour être remarqué. Et je retrouve ainsi ce qui faisait mon plaisir simple quand j'étais à Bou Tazoult : rechercher la trace des avions le jour et des satellites la nuit. A l'époque il y en avait très peu et en voir un témoignait d'un exploit. Aujourd'hui, c'est plutôt l'inverse, et nous sommes sous la route de nombre d'avions volant vers des destinations lointaines, africaines et sud américaines. 

PAWLAK, TRAMOY des noms du cru ?

A moi, bien sûr, il me disent beaucoup. Ils me rappellent cette époque du début des années 50 où la famille PAWLAK habitait à Bou Tazoult avant de partir pour d'autres cieux marocains vers 1961, tandis que les TRAMOY y restaient jusqu'en 1968.

Quelques photos parues çà et là dans le blog en attestent : à l'école du village, à l'arbre de Noël, en promenade au Tidili et ailleurs.

Sur la première photo, issue de la collection de Lucette SANCHEZ (une autre copine de classe), on reconnaît facilement la blondeur des « polonais ». Leur famille venait de Pologne, après une station en Allemagne de l'Est où sont apparus les aînés. Ils ont, comme les autres migrants, découvert un monde nouveau, loin des paysages habituels : des étendues désertiques, caillouteuses, peu végétalisées, tout le contraire de l'Europe du Nord-Est.

 classe-Bou_Tazoult-photo 1 Richard (au fond devant Mme MORPHI, face au photographe) était mon copain de petites voitures, nous rivalisions : lui avec ses Solido et Corgi Toys, moi avec mes Dinky Toys. Chacun sa religion ! De mémoire, on ne se disputait jamais, trop occupés à créer des circuits dans la terre. Nous échangions aussi les illustrés de cow boys et d'indiens.

On se « chamaillait » davantage avec Danuta (celle qui travaille, la tête penchée sur son cahier), sa cadette, qui aimait partager les jeux de garçons. Waldemar, le troisième enfant PAWLAK, né à Bou Tazoult (grâce au Dr MANDRYKA), était déjà beaucoup plus jeune et se mêlait peu à nos expériences.

Danuta avait son caractère, et ce n'était pas fait pour nous déplaire. Déjà, à l'époque, elle n'hésitait pas à se « frotter » aux garçons qui voulaient l'écarter et la renvoyer jouer avec les autres filles du quartier.

Photo de classe, à compléter par ceux qui reconnaissent les élèves.

De gauche à droite, sur la rangée du fond : X, X, Danuta PAWLAK, Patrick IACHELLA, IBANEZ (Yvanez), Richard PAWLAK, X, Lucette SANCHEZ, X, devant Mme MORPHI.

De gauche à droite sur la rangée plus proche : Joëlle WOCIEKOWSKI, X, Pascale TRAMOY, Jean-Claude POMARES, X.

Sur la même photo, ma soeur Pascale, petite brunette à la chevelure coupée au carré, regarde fixement l'objectif. Les TRAMOY venaient du Sud-Est de la France, où sont nés trois enfants dans la région lyonnaise, mais deux filles nées également à Bou Tazoult, avec le Dr GORCE.

À preuve, le plaisir que nous avons eu à nous retrouver, Danuta et moi, une première fois à Ouarzazate il y a deux ans, autour de l'association de Malika ABDEDDINE, Michkat Tassoumat. Il nous avait fallu beaucoup d'entêtement et d'organisation, tout çà pour des retrouvailles réduites à une seule journée prise au milieu d'un séjour mouvementé de chacun. Mais la complicité immédiatement retrouvée nous avait permis de nous présenter respectivement nos conjoints et amis, d'agir aussitôt dans le cadre de l'association, … (Cf : 24 juin 2011, visite de l'association Michkate Tassoumat – mai 2011)

En cette année 2014 Danuta et son mari André ont eu la gentillesse de « monter » de Toulouse jusque chez nous dans la région de Morlaix, tout au nord de la Bretagne. Ma soeur Pascale nous a rejoint pour quelques heures autour d'une table.

Il faisait particulièrement beau, un présage? Encore une petite journée. Mais une convergence d'envies, de souvenirs partagés, une concentration de plaisirs : un jalon sur une route future ! 43 ans de séparation gommés en quelques minutes. Il n'est pas certain que les adultes de l'époque aient eu le sentiment d'avoir « coupé les bras » des enfants, que nous étions alors, en déplaçant les familles, pour obéir aux obligations économiques et professionnelles.

Pawlak-Tramoy- 2

Aujourd'hui, nous avons changé physiquement, … un peu, si peu. (de gauche à droite sur la photo: Danuta, Jean-Yves, Pascale et André, et sur l'autre ci-dessous Marie-Thé est venue s'installer à côté de Danuta).

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L'occasion d'une excursion à Carantec, petite cité balnéaire voisine de Morlaix (prolongée jusqu'à Roscoff, petit port historique en face de l'île de Batz). Un site enchanteur, aux nombreuses plages, qui abrite le château du Taureau (construit pour empêcher les anglais de pénétrer dans la baie) et l'île Louet (abritant un phare)

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Une promenade en bord de mer avant de rejoindre un restaurant derrière la plage, magnifique au soleil couchant. C'est un des bonheurs de cette frange du Finistère, quand il fait beau. Le changement d'heure favorise les soirées longues.

Malheureusement, le lendemain, il nous a fallu retourner au travail de bonne heure, et nos amis toulousains sont repartis vers d'autres cieux.

Tous les iminiens sont cordialement conviés chez nous pour un séjour, nous serons ravis de les recevoir et de les héberger. La maison respecte le principe marocain de l'hospitalité naturelle. Vous y trouverez quelques reliques artisanales de notre époque marocaine.

Il nous arrive souvent de penser à nos anciennes maisons de Bou Tazoult, nos points d'ancrage colorés dans la terre rouge, sous le ciel bleu, baignés du vert des takaouts.

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Celle de Danuta, pas très loin de l'école européenne, avec la porte ouvrant sur la cuisine, et les dépendances sur le côté droit. Au fond le terril et le bordj.

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Celle des Tramoy située sous le château d'eau de Bou Azzer dominant la vallée.

Mais Danuta et André ont effectué un petit périple breton, et je leur laisse le soin d'écrire un reportage à leur façon.

Mille mercis à eux de ne pas oublier les années marocaines et de les prolonger en France, de tisser des mailles d'amitié en fils d'or.

Jean-Yves TRAMOY.

Quel dommage que ces maisons de Bou Tazoult soient abandonnées à leur triste sort, et qu'elles ne soient pas occupées, animées par des rires d'enfants, leur jardin cultivé … Les arbres résistent malgré la sècheresse, ils n'ont pas été plantés en vain. C'est déjà une consolation, comme une oasis dans un désert de pierres.