LE MANGANESE A 100 MILLIONS D'ANNÉES

LA FORMATION DU MANGANÈSE À L'ÉPOQUE Où L'HOMME N'EXISTAIT PAS

RHALMI Mohamed, un enseignant-chercheur explique comment le manganèse s’est formé dans la région d’Imini.
Monsieur Rhalmi connaît les mines d'Imini. Il y a fait plusieurs missions d'études d’un à deux mois réparties sur quatre ans ( 1989-1992). Il a remis ses conclusions à la suite de sa collaboration avec la SACEM. Le site de Boutazoult, l’exploitation et le traitement du manganèse n'ont pas de secret pour lui.
Il est Docteur de l’Université de Dijon en géologie sédimentaire et a obtenu un Doctorat d’Etat dans cette spécialité à Marrakech et à Reims en 2000.
Il enseigne à la faculté des sciences et techniques à Beni-Mellal.

Il est possible d’avoir une idée de ses recherches et de son enseignement dans des revues scientifiques de différents pays, tels l’Afrique du sud où il a coopéré aux travaux de l’équipe du professeur J. Gutzmer. Ses collaborations sont internationales : l’Italie (le Veneto), l’Espagne (Grenade), la France (Dijon et Reims) .
Il a participe à des colloques internationaux, notamment en Autriche et a écrit également dans la Revue de Paléobiologie de Genève (Suisse).

L'ORIGINE DES GISEMENTS DE MANGANÈSE
Ils ont été formés à une époque géologique très lointaine appelée le Crétacé, période où le niveau des mers était élevé et où par conséquent des couches importantes d’alluvions au fond des lacs, mers et lagunes se sont constituées. Cette période géologique a commencé il y a environ 145 millions d’années et s’est terminée par une forte densité d’iridium 80 millions d’années plus tard, ce qui a correspondu avec la disparition des dinosaures.

Cependant il est possible d’être plus précis sur la datation de la formation du manganèse de la vallée de l’Imini, comme de celui du continent africain. Les géologues, par l’analyse des strates géologiques situent l’apparition du manganèse à la fin du Cénomanien et au début du Turonien. Ces noms rarement utilisés en dehors des spécialistes correspondent à deux périodes successives de dépôts sédimentaires du Crétacé.

LE CENOMANIEN (ou Woodbinian) est le premier niveau du Crétacé supérieur. Il s'étend entre -100 Millions d’années et – 93 (ou -94) Ma. À l’époque du Cénomanien les mers recouvraient de plus grandes étendues, elles se trouvaient à environ 150 mètres au dessus du niveau actuel,  un record !
Le Cénomanien doit son nom à l'ancien peuple des Cénomans qui vivaient dans la région du Mans, dans la Sarthe. Ce nom fut donné par le géologue Alcide d’Orbigny en 1847 et adopté par les géologues de tous les pays. Le Cénomanien commence par des enveloppes de foraminifères et finit par des ammonites ou petits escargots. C’est aussi l’époque d’apparition des lézards et des serpents.

LE TURONIEN est l’étage juste au-dessus du Cénomanien. Il s’est formé entre – 93 (- 94) Millions d’années et - 90 Millions d’années. Le nom de Turonien a été attribué en 1843 en référence à la ville de Tours, aussi par A. d’Orbigny. À sa base on trouve de petits coquillages comme des escargots plats ou ammonites et à son sommet apparaissent des coquillages formés de deux coquilles, ressemblant à des moules.

Pour les géologues, c’est à la jonction de ces deux périodes du Crétacé que se sont accumulés les dépôts de manganèse de la vallée de l’Imini. Ce passage est représenté par un niveau marneux sombre, nommé le «Niveau Thomel» qui correspond à la poudre noire de Boutazoult. À cette époque il y eut un accident sur tout le continent, une baisse et même une disparition de l’oxygène. En revanche une montée importante des teneurs en manganèse s'est produite, accompagnée  d'une moindre teneur en plomb et en barium.
On trouvera des précisions sur ces mécanismes dans la thèse du professeur Mohamed Rhalmi: Contrôle sédimentaire et diagénétique de la minéralisation manganésifère au cours du Crétacé supérieur dans la région d'Imini. Voir le résumé par le lien suivant : http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=2586773

Mohammed Rhalmi, qui depuis Bou Tazoult a étendu ses recherches et analyses aux bassins de Ouarzazate et Errachidia-Boudnib-Erfoud, fait l’hypothèse d’un lessivage des roches anciennes (socle pré-cambrien III) à l’origine d’un détachement et d’une concentration du manganèse, le reste apparaissant par assèchement.

Cette compréhension de la formation du manganèse pose la question de l’avenir des ressources fossiles de la terre. S’il a fallu 100 Millions d’années avant d’exploiter le gisement de Bou Tazoult, c’est seulement en 60 ans que s'est déroulé son extraction. Que ferons nos enfants et nos petits enfants quand il constaterons que toutes les ressources fossiles auront été épuisées ?